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Dépression post-partum : vous n’êtes pas seule !

le 17/01/2025

Au sein de la maternité de l’Hôpital privé de Marne-la-Vallée, Carole Andrianavalona, exerce le métier de sage-femme avec passion, ses missions l’amènent à suivre plus particulièrement les grossesses pathologiques et les patientes dans des situations de vulnérabilité. Témoin des défis psychologiques que rencontrent certaines mères après l’accouchement, elle alerte sur la dépression post-partum.

bébé endormi sur l'épaule de sa maman soucieuse
La dépression post-partum touche environ 1 mère sur six

La dépression post-partum trouble touche environ une mère sur six[1]. Elle demeure encore méconnue et taboue, conduisant parfois à un déficit dans la prise en charge. Carole partage son expérience et ses conseils pour aider les femmes concernées.

 

Comprendre la dépression post-partum : quelle différence avec le baby blues ?

La dépression post-partum (DPP) est un trouble sérieux qui survient bien après les premières émotions de l’accouchement. Elle se distingue du baby blues, un phénomène transitoire souvent observé au cours des jours qui suivent l’accouchement. « Le baby blues se manifeste généralement à la maternité, vers le troisième jour après l’accouchement. Les patientes ressentent une grande fatigue, pleurent facilement, et sont submergées par les émotions. Mais elles relativisent rapidement. C’est très courant et c’est surtout lié aux hormones » explique Carole Andrianavalona.

En revanche, la dépression post-partum se manifeste plus tard, souvent après le retour à domicile. « Elle apparaît au-delà du dixième jour, parfois même six à huit semaines après la naissance. C’est un état dépressif profond avec une tristesse marquée, de l’anxiété et une remise en question de leurs capacités maternelles, précise-t-elle. Ces femmes se retrouvent parfois isolées, et n’osent souvent pas demander de l’aide, ajoute Carole, alors que c’est justement là qu’elles en auraient le plus besoin. Les symptômes peuvent inclure des troubles du sommeil importants, un manque d’appétit, un isolement, des difficultés à prendre soin de soi. Dans des cas extrêmes, il peut y avoir des idées suicidaires ou des risques de mises en danger pour la mère et/ou le bébé » alerte Carole.

 

Quels sont les signaux d’alerte ?

La détection de la dépression post-partum repose sur l’observation attentive des signes avant-coureurs et des situations de vulnérabilité. Carole Andrianavalona, qui travaille avec des patientes dans des contextes souvent complexes, souligne l’importance d’être à l’écoute lors des rendez-vous prénataux, afin d’orienter les patientes qui en auraient le besoin vers le/la psychologue du service de maternité, dont le rôle est crucial en cas de dépression post-partum. Certains critères de vulnérabilité peuvent être rapidement identifiés, tels que des antécédents dépressifs, un deuil périnatal par le passé, une grossesse compliquée, des conflits familiaux tels que des cas de violences conjugales. « Parfois, la PMI (Protection Maternelle et Infantile) ou d’autres professionnels de santé signalent des cas préoccupants avant même l’accouchement », précise-t-elle, ce qui permet de faciliter la prise en charge et l’accompagnement des patientes.

Mais il existe aussi de nombreux cas de dépression post-partum qui surviennent sans aucun signal avant-coureur ni contexte psychosocial particulier. Toutes les femmes peuvent être concernées. Pour briser le tabou, Laure Manaudou, ancienne nageuse olympique, a d’ailleurs récemment partagé son témoignage de dépression post-partum, intervenu après la naissance de son troisième enfant[2].

 

Quel accompagnement ? Quel rôle pour les professionnels de santé ?

Le suivi postnatal joue un rôle essentiel. Les sage-femmes libérales ou les gynécologues-obstétriciens peuvent repérer ces troubles lors des consultations de suivi, mais ce dépistage reste inégal. « Malgré l’obligation légale d’un entretien postnatal, beaucoup de femmes passent à travers les mailles du filet. Il faut sensibiliser les patientes à l’importance de ces rendez-vous » rappelle Carole.

En cas de doute, des dispositifs spécifiques sont mis en place, allant de consultations supplémentaires à une orientation vers un psychologue, une assistante sociale ou un psychiatre, selon les besoins des patientes. « Nous avons parfois recours à des unités mère-bébé ou à des hospitalisations à domicile pour les cas les plus graves. L’objectif est toujours d’assurer un soutien adapté et de prévenir l’aggravation », explique la sage-femme. Il existe également des Unités de consultations Parents-bébés en dehors de la maternité, spécialisées dans la Parentalité et les difficultés périnatales. Des aides à domicile peuvent également être mises en place.

 

Conseils pour les futures ou jeunes mamans et leurs entourages

Pour prévenir ou mettre fin à une dépression post-partum, Carole Andrianavalona insiste sur l’importance de créer un environnement bienveillant autour des mamans. « Quand il y a un co-parent, je leur conseille de se relayer et de prendre le temps de s’ajuster à ce nouvel équilibre familial. » L’entourage proche a un rôle clé à jouer. Les amis ou la famille peuvent soutenir concrètement les mères en s’occupant des tâches quotidiennes pour qu’elles puissent se consacrer à leur bébé et à leur propre repos. « Si elles le peuvent, il ne faut pas hésiter à déléguer les courses ou les repas. Cela permet aux mamans de se recentrer sur l’essentiel : leur bien-être et celui du bébé » précise Carole.

Dans les cas où la mère ou le couple est isolé, elle encourage à rechercher des soutiens externes. « Les centres de PMI, offrent des suivis pluridisciplinaires (sage-femme, puéricultrice, médecins, psychologues, etc.) et facilitent les interactions avec d’autres familles ou mamans. Il est essentiel de briser l’isolement et de parler de ses ressentis, sans crainte d’être jugée. » Les consultations avec des psychologues jouent un rôle essentiel pour cela.

Au-delà de la dépression post-partum, la sage-femme met en garde contre les injonctions qui pèsent sur les mères. « Les réseaux sociaux et la société actuelle véhiculent l'image d'une maternité idéalisée : la mère qui retrouve sa silhouette en quelques semaines, gère sa maison parfaitement et s'épanouit instantanément dans son nouveau rôle. Cette vision est irréaliste. » Elle alerte également sur l'accélération de notre rapport au temps : « Les femmes sont incitées à rentrer vite chez elles, à reprendre leurs activités rapidement, à performer dans tous les domaines. Or, devenir mère nécessite du temps, de l'adaptation. Un bébé qui pleure et réclame les bras, un corps qui se transforme... tout cela est normal et requiert de la patience. »

La dépression post-partum n’est ni une fatalité ni une faiblesse. Un accompagnement adapté peut apporter un soutien important pour aider les mères concernées à retrouver une bonne santé mentale « Il faut encourager les mères à demander de l’aide. La dépression post-partum est une condition qui se soigne, mais le premier pas est d’en parler » conclut-elle. « Pour chaque mère en difficulté, il existe des solutions et des professionnels prêts à les accompagner ». Son message clé : « vous n’êtes pas seules ! ».